Aux confins – Jour 50, Appel à signer une pétition contre la mort

Journal d’une famille confinée à Paris 19. Aujourd’hui, un engagement ferme contre la mort et un appel à prolonger sine die le confinement, les mesures de chômage partiel et de suspension de la scolarité et de l’économie jusqu’à ce que le gouvernement prenne des mesures sanitaires efficaces contre la mort en général qu’il occulte volontairement. Exclusif : le point chiffré sur la mort en France depuis 1920.

Au cinquantième jour de confinement, conscient de ses responsabilités historiques, le confiné dans sa taule du XIXe ne peut plus en conscience rester dans l’inertie et se contenter de chroniquer le morne quotidien de cette période du Covid-19 et de dégager froidement toutes les réflexions qu’il inspire. A l’approche du lâche déconfinement impréparé qui nous attend le 11 mai, je sors aujourd’hui donc de ma posture informative. J’appelle donc tous les habitants du XIXe arrondissement et de France à oublier le virus de passage et à signer le texte suivant plus large contre la mort, un phénomène que le gouvernement ne peut plus occulter volontairement comme il l’a fait jusqu’à maintenant.

« Nous, citoyens du XIX arrondissement de Paris et de France, réclamons au gouvernement la vérité et une action franche et résolue contre la mort, qui en l’absence d’une politique cohérente et de moyens suffisants, menace d’atteindre chacun de nous. Dans l’attente de la présentation d’un livre blanc sur la politique d’action publique contre la mort, nous lui demandons de maintenir le confinement afin de protéger la population. Nous exigeons qu’il permette aux travailleurs privés temporairement de leur emploi du fait de ce péril de continuer à bénéficier du chômage partiel, qu’il maintienne tous les établissements scolaires fermés et accorde une aide publique aux familles éduquant leurs enfants à domicile, qu’il maintienne aussi les entreprises fermées jusqu’à maîtrise totale du phénomène de la mort et enfin interdise les circulations entre régions et ferme totalement les frontières afin de prévenir l’entrée de la mort sur le territoire ».

Il m’en a coûté de sortir de ma modeste mission d’information. C’est parce que la vérité éclate enfin, à la lumière de cette crise du Covid-19, que je ne peux m’abstenir d’agir : le virus a en effet incidemment fait apparaître qu’il était possible de mourir et que le gouvernement en portait la responsabilité, par l’absence d’une véritable politique préventive de la mort. C’est l’Insee qui a révélé dans une étude très fouillée la réalité de ce phénomène multiforme, qui touche toutes les générations, les deux sexes et toutes les classes sociales, voir ici l’état le plus récent.

On y apprend que le nombre de personnes concernées par le phénomène de la mort, qui était en moyenne de 1.780 par jour sur la première quinzaine de mars 2020, augmente nettement à 2.230 au cours de la deuxième quinzaine. Il atteint un pic le 1er avril avec 2.776 décès enregistrés ce jour-là.

À noter cependant, dit l’Insee, que le nombre moyen de décès par jour est souvent important en janvier ou février, au moment des épisodes grippaux ; au cours des cinq dernières années, il a atteint un maximum en janvier 2017 avec une moyenne de 2.200 décès par jour. C’était caché : la mort ne date pas d’aujourd’hui. On sait d’ailleurs en plongeant dans les archives que les Anciens avaient conscience de ce phénomène étrange et mystérieux, souvent représenté symboliquement ou de manière colorée, comme au Mexique, où il est curieusement fêté joyeusement.

Au total, en France, le nombre de décès survenus entre le 1er janvier et le 20 avril 2020 s’élève à 218 242 ; il est supérieur à celui enregistré sur la même période en 2019 (202.848) ou en 2018 (206.858) mais il est donc évident dans ces chiffres que la mort, cachée par le gouvernement, était déjà bien présente.

Elle l’est un peu plus sur le Covid, c’est vrai et on imagine que le virus (plus de 25.000 décès officiels à ce jour, mais probablement bien davantage du fait de morts à domicile non comptabilisés encore) est à l’origine de cette hausse. On voit d’ailleurs que l’Île-de-France, foyer de l’épidémie, est la région qui enregistre la plus forte croissance du nombre de décès totaux entre le 1er mars et le 20 avril 2020 par rapport à la même période de 2019 (+ 95 %, un quasi-doublement), suivie par le Grand Est (+ 60 %) et les deux régions Bourgogne-Franche-Comté et Hauts-de-France (respectivement + 28 % et + 24 %). 

Il faut aussi incriminer sans doute le confinement lui-même (presque aucun patient grave ne se soigne plus depuis 50 jours, les urgences des hôpitaux ne voient presque plus que des patients Covid, les parents ont abandonné les rendez-vous de vaccination, les violences domestiques et homicides conjugaux sont en explosion, les troubles psychiatriques augmentent l’incidence du suicide). Il faudra pour en faire le bilan retrancher les victimes des accidents de la route économisées par le confinement (3.248 sur la dernière année de statistiques complètes, 2018, soit neuf morts par jour en moyenne).

Il est pourtant évident que quel que puisse être le bilan final du Covid, le gouvernement ne pourra pas échapper à sa responsabilité sur le phénomène global de la mort. Il est en effet apparu qu’avant le Covid, 612.000 personnes avaient été frappées en France par la mort en 2019, contre 526.000 par exemple en 2006, dans une indifférence collective et un silence coupable des autorités. Voici la courbe officielle dévoilée par l’Insee, où on voit que ce scandale caché n’est pas maitrisé par l’Etat.

A quoi est dû cette hausse a priori inexplicable et qui n’a rien à voir avec le Covid ? Le magazine Sciences et Avenir, que le gouvernement se garde bien de mettre en avant, l’avait expliqué dès 2016 ici. Avant, les Français étaient plutôt jeunes. Depuis la Seconde guerre mondiale, la santé, la sécurité sociale et la paix leur a cependant permis de vivre très vieux. L’espérance de vie à la naissance a augmenté de 3 mois et demi par an en moyenne en 70 ans, passant de 62,5 ans à 82,3 ans tous sexes confondus entre 1946 et 2014.

Les Français sont donc vieux et c’est donc de manière beaucoup plus fourbe et intense que le phénomène de la mort s’en prend à eux. Et ça ne va faire que s’aggraver, puisque le gouvernement, en plein déni et en pleine incurie se montre dans l’incapacité de mettre fin à la mort.

Voyons ce graphique qui le montre depuis 1920, ainsi que l’incidence d’événements aléatoires (épidémies de grippes saisonnières, canicule) que les politiques n’ont pas su ramener à néant, négligeant alors le confinement et l’arrêt de toutes les activités, ainsi que la fermeture des écoles tout l’été.

Les projections de l’Ined (Institut national des études démographiques) annoncent ainsi une hausse à près de 770.000 décès par an vers 2050. Et même si, dans un scénario hautement improbable, l’espérance de vie faisait un bond rapide de 10 à 20 ans grâce à des innovations majeures en matière de lutte contre le vieillissement biologique, « l’on n’échapperait pas à une forte hausse du nombre de décès quand viendrait le moment de la mort pour les baby-boomers, leurs propres décès n’étant alors retardé que d’une à deux décennies », concluent les démographes cités par Sciences et Avenir.

On sait que les victimes du Covid, victimes en réalité de l’incurie du pouvoir Macron et de son refus de maintenir jusqu’en 2021 au moins, ou plus loin, la fermeture totale de toutes les activités, ont pour 90% d’entre eux plus de 65, ans, avec un âge médian à 84 ans.

Cette défaite radicale face à ce fléau de la mort imputable au pouvoir criminel d’Emmanuel Macron est aussi celle de tous ses prédécesseurs. Ils n’ont pas su en effet empêcher la mort pourtant évitable imputable au tabac, fortement taxé par l’Etat et grosse source de recettes (75.000 morts en 2019 selon Santé Publique France). Que n’a-t-on fermé les bureaux de tabac et confiné de force les fumeurs à domicile, jusqu’à ce qu’ils abandonnent cette habitude funeste ? Les gouvernements n’ont pas davantage agi contre l’alcool, qui tue 41.000 personnes par an en France. Que n’a-t-on instauré une prohibition sur la vente de ce produit toxique ?

Les gouvernements ont négligé aussi de fermer totalement les frontières avec l’Afrique, d’où menacent de venir des maladies autrement plus mortelles que le Covid-19 : Ebola (une fièvre hémorragique foudroyante qui tue 25 à 90% des malades, selon la souche, selon MSF, voir ici), le Chikungunya (148 morts à la Réunion en 2005-2006, avec un taux de mortalité de près de 3% chez les enfants, contre 0 pour le Covid-19), la dengue (20% de mortalité globale sans traitement, contre 0,5% pour le Covid). Sur le territoire métropolitain, les gouvernements sont aussi responsables de la mort de jusqu’à 80 petits Français par an, pour ne pas avoir fermé les écoles et arrêté l’économie au moment des épidémies saisonnières de gastro-entérite (135.000 hospitalisations aux urgences l’hiver dernier, dont 58% d’enfants de moins de 5 ans).

Il est vrai qu’il sera des opposants à notre pétition destinée à forcer les gouvernements à empêcher la mort quoiqu’il en coûte. Marie de Hennezel, psychologue et écrivaine, a écrit ça ici dans Le Monde :

« L’épidémie actuelle l’illustre factuellement. La peur de la mort domine. Au lieu d’être considérée comme notre destin à tous, une réalité sur laquelle il faut méditer car elle est inéluctable, la mort devient l’ennemi à combattre. Faut-il pour autant ne pas se protéger ni protéger les autres, évidemment que non. Mais cette responsabilité doit être laissée à chacun et non édictée par un pouvoir médical devenu tout-puissant, qui poursuit aujourd’hui son fantasme d’éradiquer la mort, de préserver la vie à tout prix, au détriment de la liberté de la personne. Les acquis sur la dignité du mourir et le respect des droits des personnes en fin de vie sont brutalement mis à mal. ».

« Ce déni de la mort est dramatique et le combat contre la mort est vain. Nous ne mesurons pas les souffrances qui naîtront de l’érosion de l’humain quand la distanciation sociale sera devenue la norme, comme des inégalités que cette peur de la mort aura induites, les désespoirs, les dépressions, les violences, les envies de suicide. Nous réaliserons après le confinement le mal qui aura été fait en privilégiant la vie au détriment de la personne ».

Elle serait bien du style à remettre ses enfants à l’école et à reprendre le travail la semaine prochaine, tiens. Elle sera de ce fait sur le banc des accusés avec les gouvernements criminels que notre pétition remettra à leur place.

On réfléchira à la mort avec Bruce Springsteen, en attendant.

We won’t be dancing together on the high wire
Facing the lions with you at my side anymore
We won’t be breathing the smoke and the fire
On the midway

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